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Les nuisances aériennes

Article issu de Nature Actualités n°83-84-85 (2001)

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Avertissement : Ces textes ne sont pas politiquement corrects. Ils vont à l'encontre des idées généralement émises en ce moment. L'auteur les assume et admet qu'elle puisse se tromper, mais peut-être pas.

Rappel des faits : L'année qui s'achève a donné lieu à un vaste débat parti de l'établissement par la DGAC de nouveaux couloirs concernant l'aéroport d'Orly.

Dans l'évolution des débats et de la réflexion, on a pris conscience collectivement que les couloirs n'étaient qu'un des aspect d'une question beaucoup plus vaste, occultée par les responsables, le développement du transport aérien.

Voici l'enchaînement des questions qui se sont posées selon nous : -l'exploitation des nouvelles pistes construites à Roissy permettent un nouvel accès " Sud Ouest " en Ile de France (quatrième point d'entrée à Roissy). - pour assurer la sécurité et éviter le mélange des trafics Orly et Roissy, il faut modifier les accès actuels à ces aéroports, d'où le débat qui a eu lieu cette année. Les premières réactions d'opposition aux nouveaux couloirs semblent être parties d'élus et d'associations de l'Essonne. s En outre le développement du transport aérien suivait, avant les évènements du 11 septembre 2001, une croissance annuelle de l'ordre de 3 à 5 %. Toute quantité qui s'accroît de 3 % par an double en 25 ans. 3 % ce n'est pas beaucoup et 25 ans c'est court.

Il faut pouvoir assumer. Orly et Roissy peuvent parfaitement accueillir beaucoup plus de passagers qu'actuellement mais les possibilités d'extension sont limitées, suite aux actions des associations de riverains, soit en nombre de mouvements (un mouvement = un atterrissage ou un décollage), soit en nombre de passagers.

D'où la nécessité apparente de " construire un troisième aéroport " sans trop réfléchir.

L'ASMSN dans tout ça ? Dans ce débat, l'ASMSN, association départementale et généraliste, non-spécialisée dans les nuisances aériennes, a été invitée par le préfet de Seine-et-Marne à s'exprimer ; c'est ainsi que nous avons participé à plusieurs consultations en préfectures et nous avons été entendus par Eurocontrol, organisme européen " indépendant " chargé de réfléchir aux nouveaux couloirs aériens en Ile de France. L'ASMSN ne pouvait en aucun cas prendre parti pour tel ou tel couloir qui de toute façon concernerait la Seine-et-Marne ; où qu'ils passent les couloirs nous survolent. Elle pouvait seulement demander que les meilleures solutions touchant le moins d'habitants possibles et le moins gravement possible soient mises en œuvre, ce qu'elle a fait. L'ASMSN s'est aussi associée en invitant tous ses membres et associations locales à participer aux deux manifestations organisées à Paris pour dénoncer les nuisances aériennes. Notre association s'est manifestée par une position indépendante et originale dans la région : nous avons été les seuls à dénoncer : - le système non-concurrentiel des transports aériens (non taxation du kérosène) qui fausse les données réelles du transport des biens et des personnes ; - la course effrénée au développement de ce mode de déplacement, coûteux et polluant, non remise en cause, y compris par les autres associations, ce qui nous a surpris. - La nécessité de construire un troisième aéroport qui constituerait un éparpillement des pollutions et nuisances et un probable fiasco d'aménagement du territoire et financier. Enfin est-il bien raisonnable de translater les nuisances chez les autres ? - La pollution excessivement importante engendrée par le trafic aérien qui est encore assez souvent ignorée ou sous-estimée.

Dans ce problème complexe, une analyse fine et indépendante des gros protagonistes que sont la DGAC, AIR-France, les grands corps d'état, la chambre de commerce et d'industrie de Paris, etc est nécessaire. Il y aurait certainement plusieurs moyens complémentaires à mettre en œuvre : 60 % des passagers de Roissy sont en transit. Or le transit pourrait peut-être se répartir sur plusieurs aéroports complémentaires comme ça se pratique en Allemagne, paraît-il. Les déplacements sur courtes distances devraient se faire en TGV. Le fret et les gros porteurs de nuit pourraient se développer à Vatry, aéroport existant qui ne demande qu'à être utilisé.

Il est certain que toutes les solutions possibles n'ont pas été explorées et que la facilité intellectuelle, le conformisme, l'habitude de tout concentrer à Paris et la recherche de rentabilité à court terme conduisent à nouveau à ne pas rechercher de solutions innovantes et désastreuse pour l'environnement et la vie des habitants concernés.

En CONCLUSION Les souffrances des populations survolées sont réelles, grandes et il faut bien sur tout mettre en œuvre pour les alléger. Les manifestations de mai et novembre 2001 à Paris ont permis d'ouvrir un dialogue peu développé jusqu'à présent entre le monde aéronautique, superbement isolé dans sa tour d'ivoire, et les citoyens. C'est pourquoi l'ASMSN les a soutenues. Le chemin qui reste à parcourir est immense car les couloirs sont là et on les a bien au-dessus de nos têtes. Le dévesloppement insoutenable du transport aérien n'est pas une fatalité et n'est probablement pas endurable : à cause du gaspillage des ressources énergétiques, des nuisances engendrées pour les populations et l'impact global sur le climat.

L'ASMSN demande que la sagesse prévale et qu'on ne se précipite pas tête baissée dans des décisions qui mèneront tôt ou tard être des impasses, des fiascos environnementaux et économiques ; nous sommes tous des contribuables aussi.

Comme présidente d'une association départementale et soutenu par mon conseil d'administration, j'estime important d'amener tout le monde à réfléchir sur le monde que nous sommes en train de construire. Notre société devient un conglomérat de lobbies qui défendent chacun leur revendications sans vision globale des choses. Ceci est respectable et compréhensible mais totalement insuffisant. Il ne faut donc pas enfourcher des revendications légitimes sans élever le débat et ignorer les véritables enjeux.

POT-POURRI des plus belles fleurs

Le voyage au cœur des débats nuisances aériennes a été riche en découvertes : Nous avons relevé des petites phrases émises par des élus ou des associations importants du genre : " Nous sommes pour les avions (les avions doivent être très contents). " Parfois suivi de " oui, mais on ne veut pas des nuisances " (il y a donc des gens qui croient encore qu'on peut faire des omelettes sans casser des œufs.) Ou encore, le leitmotiv de tous ceux qui vivent d'une manière ou d'une autre du transport aérien, animés d'une générosité exceptionnelle : " tout le monde doit pouvoir prendre l'avion pour aller n'importe où, quand il veut et dans le monde entier. Ce transport doit être démocratique donc bon marché. On doit prendre l'avion comme on prend sa voiture " (Donc je vais pouvoir aller acheter des boules quiès à Pékin le prochain week-end ?)

Pire, nous avons vu le NIMBY (dans le cas d'espèces, les couloirs aériens mobiles) à grande échelle : du nimby entre département, entre communes d'un même département et même entre région. Du moment que ça passe chez les autres et pas chez nous, tout va bien… Et à nouveau l'opposition nature/citadins : dans l'hypothèse du non-survol du massif forestier de Fontainebleau, un maire a dit qu'on protégeait plus les arbres que les humains.

* * *

DE LA NECESSITE DE SE DEPLACER

Se déplacer pour quoi faire ? Il ne s'agit pas ici d'empêcher les gens de bouger mais de réfléchir pour savoir comment bouger " mieux ".

Dans les avions on trouve des gens qui se déplacent pour leur travail ou pour des motifs familiaux et des touristes. Il y a aussi du fret. Les évènements de New-York ont fait chuter le transport aérien ; on peut penser que ça ne durera pas mais cette baisse montre à l'évidence qu'on peut aussi travailler en utilisant des moyens de communications comme les video-conférences et l'internet. Des moyens de substitution partielle aux déplacements professionnels existent bien. En outre ceux qui voyagent dans le monde entier connaissent les inconvénients non anodins et la fatigue du décalage horaire.

Que dire des snobs qui ne connaissent que le cœur de Paris (les beaux quartiers généralement) et les Iles lointaines et très exotiques ? Ils pourraient se faire bronzer plus près. Il y a des lieux paradisiaques aussi en France et en Europe. Le tourisme est devenu une industrie comme les autres et sa motivation principale est économique et financière (la satisfaction des actionnaires). Le stationnement dans des camps de vacances promu par un certain type de tourisme n'est peut-être pas ce qui se fait de mieux en matière d'épanouissement personnel et de connaissances des cultures des autres peuples ! Dévorer du poulet industriel à 10 000 km de chez soi est-il un plaisir si unique qu'il nécessite vraiment d'empoisonner encore un peu plus notre atmosphère, nos poumons et nos oreilles ?

Prendre l'avion comme on prend sa voiture, est-ce bien raisonnable ? Il y a deux bilans twin towers par an en France (nombre des tué sur la route). On crève de la voiture en ville qui a tout envahi. Des lieux comme certaines autoroutes et tunnels sont une déjà une vison édifiante de l'enfer et de l'absence totale d'humanité. (Allez donc tomber en panne sur une autoroute proche de Paris ! ) La liberté et le plaisir de se déplacer librement a un prix. Avons-nous les moyens de payer une deuxième fois ce prix pour les avions ? Faudra-t-il qu'il nous pleuve des avions sur la tête? Le plaisir de la découverte d'autres lieux est immense et le voyage est important mais à quel prix ? Un baptême de l'air dans les aéroclubs à côté de chez soi procure des sensations beaucoup plus importantes qu'un " jumbo ".

RECIT DE VOYAGE : une journée à VATRY

Imaginez par un beau matin d'octobre 2001 une vaste plaine en Champagne totalement déserte, légèrement brumeuse même si on sent que le soleil va pointer. Tout à coup des entrepôts gigantesques sortant de la brume. Vous parcourez encore quelques kilomètres en vous demandant si vous êtes sur le bon chemin et puis vous tombez sur une tour de contrôle et un bâtiment qui vous rassurent : c'est bien là. Après quelques heures passées en compagnie d'élus et des responsables du site, vous n'avez pas entendu un seul avion ! C'est bien plus calme que la forêt de Fontainebleau ! Après la visite d'hangars frigorifiques dernier cri absolument vides, vous vous pincez pour vérifier que vous ne rêvez pas. On vous a pourtant dit que le Concorde était là 8 jours avant, qu'il y a déjà eu 2000 mouvements cette année, vous vous demandez ce qui se passe réellement dans ce lieu et comment on peut en arriver là ! Et vous vous dites qu'en effet il est tout ce qu'il y a de plus logique que cet aéroport international soit utilisé pour le fret, particulièrement les gros porteurs de nuit qui réveillent le maximum de riverains ! Mais quelques jours après vous lisez dans la presse que 70 % du fret voyage dans les soutes des avions de transports de voyageurs. Alors quoi ?

Christine Gilloire

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