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Adieu et merci Monsieur Monod

Article issu de Nature Actualités n°82 (2001)

Le 22 novembre 2000 à Versailles, s'éteint Théodore MONOD, né le 9 avril 1902 à Rouen, l'un des plus illustres savants naturalistes du XXème siècle, à la fois biologiste, géologue, botaniste et anthropologue. Il partageait son temps entre son bureau-laboratoire, sa planche à dessiner, les prospections sur le terrain et d'importantes responsabilités dans de nombreuses sociétés savantes. Son apport scientifique est considérable, ses publications très nombreuses ; ses collections recueillies dépassent les 20 000 pièces (chiffre qu'il s'était promis d'atteindre et qu'il a dépassé). Le nombre d'heures passées au cours de sa vie penché sur la loupe binoculaire est inimaginable ; il a mis sa rétine à rude épreuve sacrifiant sa vue pour la science.

Naturaliste, mais aussi humaniste, pacifiste, protestant, " apprenti chrétien " comme il aimait se définir, Théodore MONOD tenait pour indispensable la dimension morale dans l'attitude de l'homme vis-à-vis de la nature, pour contribuer à " l'humanisation de l'humanité ", selon sa propre expression.

C'est en tant que très grand connaisseur de l'Afrique que le grand public le connaissait surtout. Il a sillonné le désert maintes fois, à pied ou à dos de chameau, et il est le fondateur, avec deux savants russes, de l'érémologie c'est-à-dire de l'écologie des déserts. " La grande leçon du désert est la patience, l'humilité, une certaine saveur de liberté, de simplicité, de nuits sans toit, de la vie sans superflu ". (1)

Ses talents étaient variés : poête, dessinateur, et, grand ami, entre autre, de Teilhard de Chardin, sa culture était impressionnante ; sa vie fut une série de quêtes successives, s'intéressant à de nombreux domaines, tant scientifiques et historiques que philosophiques et religieux. Polyglotte, il était à l'aise dans les citations en anglais, en allemand, en arabe et même en hébreu. Rigueur, force , détermination comptaient parmi ses nombreuses qualités. Tous ceux qui ont approché ce grand personnage en ont conservé une image rayonnante.

Infatigable, il était de tous les combats, ses prises de position ne manquaient pas : pendant la guerre de 39-45 où il fustigea la barbarie ; contre l'armement atomique ; contre la guerre, contre la violence envers les animaux. Un de ses ouvrages s'intitule " Révérence à la vie ".

Théodore MONOD, qui a toujours lutté contre une science sans morale, continuera à vivre parmi nous tant que des cœurs humains épris de justice, de bonté et d'amour de la nature continueront à battre. " Je crois à l'existence d'une montagne unique. Nous la gravissons les uns, les autres par des sentiers différents avec l'espoir de nous retrouver un jour au sommet, dans la Lumière et au-dessus des nuages ". (2)

Autres citations : " Le peu que l'on peut faire, il faut le faire…mais sans illusion. " De la nécessité " D'obéir à ses convictions… " " Ce ne sont pas quelques manifestations ou pétitions qui feront cesser l'esclavage, les ventes d'enfants, la faim, la grande misère. Mais de telles tragédies ne peuvent qu'inciter à l'action pour exprimer notre désaccord et ainsi sauver l'honneur ". " L'utopie est simplement ce qui n'a pas encore été essayé. " " Eh oui, mais il faut savoir lire ; la nature ne parle qu'à celui qui l'écoute, et qui sait écouter. Elle ne répond qu'à une attente et se tait devant l'incurieux. "

Parmi ses nombreux livres publiés : " Méharées " 1937, réédition Actes Sud 1989 " Déserts " Horizons de France,1973 " L'Emeraude des Garamantes " 1984 " Le chercheur d'absolu " Le Cherche-Midi,1997 " Révérence à la vie " 1999 " Et si l'aventure humaine devait échouer " Grasset, 1999 N.B. Actes Sud a publié plusieurs de ses ouvrages.

Plusieurs livres ont été écrits sur Théodore MONOD et de très belles vidéos ont été tournées, la plupart du temps en milieu saharien.

Daniel MEYNIEL

(1) Méharées (2) Pèlerin du désert

SOURCES Pascal BRAUD, in " Sortir du nucléaire ", revue n°12, janvier 2001 Hubert GILLET, in Publication trimestrielle des Amis du Muséum d'Histoire Naturelle - décembre 2000.

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